Le pasteur Blanchard nous avait donné rendez-vous à 21 heures. L’heure à laquelle la nuit tombe. L’heure à laquelle Paris, la capitale de notre pays, qui est notre fierté au grand jour, devient durant la nuit le Paris de la honte et de l’abandon. Le théâtre de la misère la plus scandaleuse, la plus inacceptable : celle des Français sans logements, sans aides, sans ressources, sans rien.
Nous étions, le pasteur et son épouse, et nous, Jany,Céline,Pierre-Claude Renée et moi même, venus simplement aider, assister et quelque peu soulager cette misère effroyable. Paris, ce sont des centaines de centaines d’inconnus, d’anonymes, qui dorment dehors, seuls. Cette nuit-là, ils sont pour quelques heures nos seigneurs et nous allons les servir. Un peu de café, un peu de soupe chaude, quelques vêtements, mais surtout beaucoup de réconfort, d’écoute, de solidarité. Beaucoup d’humanité et de fraternité.
Si quelqu’un veut vraiment parler de la misère en France, il doit venir en maraude avec le pasteur Blanchard. Si quelqu’un veut connaître l’état de notre société, non au grand jour, mais en pleine nuit, il doit venir en maraude avec le pasteur Blanchard.
Notre première impression en voyant ces malheureux à tous les coins de rue, c’est cette promesse de Nicolas Sarkozy en 2007 : « Moi président, dans cinq ans, plus personne ne dormira dans la rue ». Inutile de préciser à ceux qui nous lisent que cette promesse n’engageait que ceux à qui elle était faite !
À l’ASP, nous ne faisons jamais de promesses, nous agissons concrètement tout simplement. Non au grand jour sous l’œil des caméras, mais la nuit dans l’anonymat. Voilà quelle a été notre nuit dans les rues de Paris, notre nuit.
Nous avons agi. Nous avons revu le mythique Francis, véritable vedette de nos maraudes. Nous avons visité jeunes et vieux, nous avons rencontré des solitaires mais pas complètement seuls car ils ont comme compagnie leurs chiens. Nous avons rencontré de nombreuses personnes, d’horizons très divers, aux histoires très différentes. Mais ils ont tous un point commun : ils sont à la rue. La France les a abandonnés tout simplement.
C’est là que l’on constate l’immense décalage entre un gouvernement socialiste et le « social ». Les socialistes n’ont de social que leur dénomination. En réalité, ils n’y connaissent rien. En réalité, leur principale préoccupation, c’est d’aider par tous les moyens les étrangers et clandestins, avant d’aider les leurs, les nôtres, les Français !
Cette maraude a duré cinq heures. Cinq heures durant lesquelles nous aurions aimé aider tous ces pauvres. Mais ils sont si nombreux, partout. Il n’y a plus un seul grand boulevard dans Paris, il n’y a plus un seul quartier dans Paris où l’on ne rencontre pas des gens qui dorment seuls, dans la misère la plus totale.
Voilà le fruit de nos politiciens, voilà le fruit de nos gouvernants successifs. Toujours de l’aide pour le monde entier, mais jamais pour les nôtres, jamais pour nos pauvres !
C’est à la fois écœurés et heureux que nous achevons cette maraude avec le pasteur Blanchard et son épouse. Écœurés par le désastre que nous avons pu constater de nos propres yeux, mais tellement heureux d’avoir pu pendant quelques heures être au service de ces miséreux, de ces parias de notre société, qui durant quelques heures d’une nuit froide, étaient nos maîtres et seigneurs.