L’âge n’a pas que des avantages, mais il donne la profondeur temporelle pour mesurer les évolutions et en comprendre les ressorts. C’est ce qui me permet de constater les ravages de l’antiracisme dans les esprits. Jamais, en effet, la notion de race n’a été aussi absolue et quasi religieuse. La race est partout, alors qu’on affirme dans le même temps que les races n’existent pas.
Dans mon activité vétérinaire, je disais à mes clients pour plaisanter que je n’étais pas raciste parce que j’aimais et soignais toutes les races de chiens, bovins, chevaux : la notion de race existe toujours pour les animaux de façon évidente et reconnue. Heureux temps où on pouvait parler de tout sans risquer le procès et la déchéance sociale !
Les Inconnus, Pierre Desproges, Coluche seraient dans l’impossibilité de réaliser certains de leurs sketches cultes ! Notre pays, la France, était alors le pays le moins raciste du monde. Mais ça, c’était avant ! Avant SOS Racisme, avant l’arrivée massive d’une immigration non seulement de cultures très éloignées de la nôtre, mais aussi avant le travail de sape d’organisations de gauche et d’extrême gauche qui, d’une part, culpabilisaient les Français de souche, et d’autre part déversaient leur aigreur, pour ne pas dire leur haine, chez ces nouvelles populations par la victimisation et un discours revanchard.
Il ne se passe pas de jour sans fait médiatique où on ne monte en épingle les faits et gestes de personnalités politiques ou médiatiques à l’aune d’un antiracisme hystérisé, comme dans la dernière polémique Nadine Morano-Sibeth Ndiaye.
Je pense alors à l’heureux temps où le deuxième personnage de la République s’appelait Gaston Monnerville, président du Sénat de 1958 à 1968. Personne ne trouvait cela incongru, ou, a contrario, ne s’en glorifiait comme signe d’ouverture et de progrès. M. Monnerville était noir, et alors ? Originaire de Guyane, petit-fils d’esclave, il était le fruit de l’élitisme républicain, et non d’une quelconque discrimination positive. Il fit des études brillantissimes d’avocat à Toulouse et fut élu d’un département de la France profonde, le Lot. Lors de mes études à Toulouse, de 1966 à 1970, un de mes camarades de promotion était Koffi Sama, Togolais, qui fera une brillante carrière dans son pays puisqu’il a été Premier ministre durant de longues années. Il ne serait venu à l’idée d’aucun de nous de le voir au travers de sa couleur de peau, il avait réussi le concours très sélectif d’entrée à l’École vétérinaire, cela nous suffisait, il était des nôtres !
Après, les choses se sont gâtées : Kofi Yamgnane, par exemple, fut décrété en 1989 « premier maire noir de France », et encensé à grands sons de trompette pour cette spécificité par les médias. « Fake news », pourtant, car Gaston Monnerville fut maire de Saint-Céré, dans le Lot, de 1964 à 1971. Déjà, la couleur de la peau commençait à fausser le jugement public, ce qui est contraire à une juste conception de l’égalité républicaine. SOS Racisme, créé en 1984, commençait à influencer les esprits… Et depuis, les choses se sont dégradées, notamment jusqu’à l’hystérie actuelle avec les revendications de populations « racisées », les camps décoloniaux, la convergence des luttes avec les néo-féministes, les vegans, les LGBTQI+, que sais-je encore, aboutissant pour le coup à de véritables tensions dans la société dont il y a tout à craindre. L’Histoire nous enseigne, en effet, que les mouvements de balancier (ou de retour de bâton comme on voudra) sont redoutables.