Je ne vais pas citer à nouveau cette célèbre phrase attribuée à Bossuet, un peu galvaudée. Vous la connaissez trop bien. Pourtant, cette sentence décrit à merveille les dernières déclarations de Benoist Apparu. Quand le porte-parole d’Alain Juppé affirme que l’« identité heureuse », concept cher à son mentor, paraphrasant trompeusement Alain Finkielkraut, s’accorderait avec le multiculturalisme, tout en refusant le communautarisme, il déplore les conséquences de ce dont il chérit les causes. Il ne fait, en effet, aucun doute que le multiculturalisme, conséquence négative d’une immigration qui ne s’est pas assimilée, est la cause première du communautarisme.
À l’origine de tous nos maux, il y a une politique migratoire parfaitement déraisonnable, depuis un peu plus de 40 ans. Cette politique porte un nom : l’immigration massive. D’abord voulue par le patronat pour jouer à la baisse sur les salaires des autochtones, l’immigration répondait aussi à une vision du monde universaliste dévoyée faisant suite aux conflits post-coloniaux. Je ne ferai pas ici l’historique de cette idéologie, mais elle domine désormais la pensée occidentale. Sur le plan politique, elle se traduit par le multiculturalisme, c’est-à-dire le fait de ne pas reconnaître une culture majoritaire, enracinée dans l’Histoire, pour une nation. On supposera donc que la France, État-nation multiséculaire, puisse ne pas procéder intégralement d’une culture française et européenne.
En ce sens, les déclarations de Benoist Apparu font écho à l’affirmation du théologien musulman Tariq Ramadan qui voudrait que l’« islam [soit] une religion française ». Il existe un islam en France, c’est un fait. Mais il n’existe pas d’islam de France. Plus précisément : l’islam n’a pas d’enracinement charnel en France. C’est donc à l’islam de s’adapter à la culture française, et non l’inverse. Dès que l’on imagine que la France puisse être multiculturelle, on admet qu’elle puisse accepter la présence de catégories différenciées de Français organisées en communautés d’intérêts selon des affinités le plus souvent ethno-religieuses.
Le multiculturalisme est opposé à l’essence de la France, sa substance, mais aussi à son incarnation politique qu’est la République, laquelle distingue les nationaux des étrangers par la citoyenneté. Si le multiculturalisme est officialisé politiquement, il se traduira concrètement par l’apparition d’une multi-citoyenneté. Que voulait dire Benoist Apparu, au fond ? Que la France est une société multiethnique, multiculturelle. Qu’au fond, les pouvoirs politiques agissent sur le réel, et qu’il serait impossible de mettre en place une politique d’assimilation. Plus encore, que notre pays doit accepter toujours plus d’immigration pour répondre aux injonctions de l’ONU et de l’Union européenne, organismes supranationaux sans identités culturelles et politiques, tétanisés par la démographie délirante du Sud.
N’étant pas d’une nature défaitiste, et étant attaché à la France historique, présentant une permanence culturelle, je pense qu’il faut refuser farouchement les volontés des juppéistes. Elles sont dangereuses. Oui à la France polyculturelle, de Charlie Maurras à Charlie Hebdo. Non à la France multiculturelle et multiconflictuelle. Voilà l’enjeu des prochaines décennies. Vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas.
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