Suite à l’annonce, par Donald Trump, du retrait des troupes américaines de Syrie, la France se trouve confrontée, plus tôt qu’elle ne l’avait prévu, au retour programmé de 130 prisonniers djihadistes, jusque-là enfermés dans les prisons syriennes. Et, dans le même temps, le ministre de la Justice, Nicole Belloubet, confirme qu’une trentaine d’islamistes radicalisés qui purgeaient leur peine de prison en France vont sortir au cours des prochains mois. Tragique coïncidence de calendrier, qui va ainsi permettre à plusieurs dizaines d’individus particulièrement dangereux de se retrouver sur notre sol à un moment où les Français se remettent à peine du dernier attentat, celui de Strasbourg, survenu il y a à peine quelques semaines, et qui avait fait cinq victimes innocentes.
Car le risque est bien présent. Il ne faut pas oublier, en effet, les attentats commis par Mehdi Nemmouche (un quadruple assassinat au Musée juif de Bruxelles en 2014) lors de son retour de Syrie. Ou de Mohammed Merah (sept morts en 2012), après son séjour dans les zones tribales du Pakistan.
Même si la lutte antiterroriste s’est notablement améliorée au fil des ans, les services de renseignement craignent toujours le retour de ces djihadistes, ainsi que la libération de ceux actuellement détenus. Ils n’excluent pas, en effet, que ceux-ci ne préparent des attentats, qu’ils contribuent à mettre en place de la logistique pour de futures opérations terroristes, ou bien encore installent des filières d’acheminement des combattants de Daech désormais rendus disponibles par la fin des combats sur zone.
Les raisons de ces craintes sont de deux ordres. D’abord, purement matérielles. Les services de renseignement, déjà fortement engagés sur des missions visant à prévenir et à réagir aussi efficacement que possible aux possibles attentats, ne disposent pas des effectifs nécessaires pour surveiller des dizaines de suspects supplémentaires. Ensuite, les moyens juridiques qui permettraient d’anticiper les actions terroristes sont trop limités, pour neutraliser efficacement des individus qui, profitant de ces vides institutionnels, seront en mesure de reprendre leurs activités terroristes sur notre sol.
Alors, bien entendu, les combattants de l’État islamique de retour en France seront interpellés. Ils seront, pour certains d’entre eux, placés en détention dans l’attente d’un « diagnostic » sur leur cas. Mais nous savons déjà que les preuves indispensables pour les maintenir suffisamment longtemps hors d’état de nuire risquent de manquer et que cela conduira inévitablement à une libération relativement rapide.
Dans les mois et les années à venir, la France et les Français vont donc devoir vivre avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Comme cela était prévisible dès le début de ce conflit, et après avoir mené des combats contre l’État islamique sur des régions entières du Sahara et du Moyen-Orient, c’est maintenant un front intérieur qui se dessine. Depuis plusieurs années, nos services de sécurité intérieure s’y préparent. Ils ont enregistré de nombreux succès mais restent à la merci d’une forme de combat souvent imprévisible et indétectable.
C’est, désormais, à nos responsables politiques de trouver les outils juridiques et opérationnels indispensables pour que la longue liste des victimes (plus de 250 morts et plus de 1.000 blessés depuis 2012) ne s’allonge encore. Car, n’en déplaise à Castaner, ces individus aux mains couvertes de sang sont des terroristes avant d’être des Français. Et ils doivent être considérés et traités comme tels.
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